But de ce blog


Le refus de procréer étant encore un tabou volontiers passé sous silence par les médias dominants, ce blog a pour vocation de montrer que le non-désir d’enfant ou le dégoût d’être né sont en réalité des invariants anthropologiques qui se manifestent à toute époque à travers les œuvres littéraires, philosophiques et même religieuses. Ainsi le but de tout bouddhiste est-il de sortir à jamais du cycle des naissances… Pour paraphraser le VHEMT : Puissions-nous rire longtemps et disparaître !

20 juin 2012

Lettre G



~ Que vaut-il mieux ? Etre ou ne pas naître ?
~ Je n’ai rien à dire du bonheur, je ne sais pas ce que c’est.
~ Dieu : quel autre enculé pourrait assumer à sa place les injustices du monde ?
~ Pour la vie il n’y a pas d’antidote.
~ Vouloir se survivre, c’est d’une arrogance monstrueuse. La seule façon de se survivre, c’est de procréer. Comme les chiens.
Serge Gainsbourg, Pensées, provocs et autres volutes. France XX°


~ Je ne veux pas renaître.
~ La souffrance est la loi des hommes.
Mahâtmâ Gandhi, Tous les hommes sont frères. Inde XX°

Je ne crois pas du tout que la procréation soit un devoir ou que le monde tombera dans le chagrin sans elle. Suppose un moment que toute procréation cesse, cela signifiera seulement que toute destruction cessera. Moksha n’est rien d’autre que la libération du cycle des naissances et des morts. Cela seul est considéré, et à juste titre, comme étant la plus haute félicité.
Mahâtmâ Gandhi, Letter to Manilal Gandhi (17 mars 1922). Inde XX°

~ Celui dont l’activité est entièrement consacrée à la réalisation de la Vérité, qui exige un désintéressement absolu, n’a pas de loisirs à consacrer à l’occupation égoïste d’engendrer des enfants et de diriger une maison.
~ Plus leur famille est nombreuse et plus ils sont éloignés de l’Amour Universel.
Mahâtmâ Gandhi, Lettres à l’ashram. Inde XX°


C’est un nouveau-né,
Fleur d’écume sur l’eau
De la souffrance humaine.
Federico Garcia Lorca, Cocotte en papier. Espagne XX°

Dis-moi, Seigneur, mon Dieu !
Notre douleur ne parvient-elle pas à tes oreilles ?
Nos blasphèmes n’ont-ils pas fait des Babels sans briques
Pour te blesser, ou aimes-tu les cris ?
Es-tu sourd ? Ou aveugle ?
Federico Garcia Lorca, Prologue. Espagne XX°

Homme ! Passion ! Peine ardente ! Prières !
Reviens changé en lune et en cœur de néant.
Federico Garcia Lorca, Sur la mort de José de Ciria y Escalente. Espagne XX°

L’arbre de sang mouille la matinée
où la nouvelle accouchée a gémi.
Sa voix met des cristaux dans les chairs vives
et un graphique d’os à la croisée […]
Adam rêve à travers l’argile en fièvre
d’un enfant qui approche en galopant
au double battement de ses pommettes.
Mais un autre homme en lui obscurément
voit une lune stérile de pierre
où lumineux s’irait brûler l’enfant.
Federico Garcia Lorca, Adam1. Espagne XX°
1. « Ce poème situe l’Adam mythique au moment crucial où il peut encore choisir de rester stérile pour ne pas livrer sa descendance à la mort vorace, comme l’y engage, dans Paradise lost (XI, 988), Eve elle-même : Childless thou art ; childless remain. So Death / Shall be deceived his glut […]. Lorca connaissait évidemment le grand poème de Milton et […] rêvait d’écrire lui aussi […] une sorte de Paradis perdu, un long poème épique et narratif qu’il aurait intitulé Adam. » – Commentaire extrait de : André Belamich (dir.), Federico Garcia Lorca, Œuvres complètes I, Paris, 1981

Tel est le monde, ami, agonie, agonie. […]
et la vie n’est pas noble, ni bonne, ni sacrée.
Federico Garcia Lorca, Ode à Walt Whitman. Espagne XX°


~ La plupart du temps, les lois sont bel et bien faites par les hommes. Il faut des enfants pour qu’il n’y ait pas de baisse du taux de natalité, disent-ils. Il faut des enfants pour faire une armée, s’énervent-ils. Il faut des enfants pour assurer les vieux jours des parents, radotent-ils. Il faut des enfants pour faire plaisir à Dieu, qui les bénit, prêchent-ils. Et les femmes, qu’est-ce qu’il leur faut ?
~ Je suis personnellement assez choquée que des femmes séropositives décident de poursuivre leur grossesse, même quand elles savent que l’enfant qui naîtra peut être lui-même atteint du sida.
~ Les natalistes qui ont tant réclamé de futurs soldats et de futurs contribuables sont (ou devraient être) obligés maintenant de reposer le problème à l’échelle de la planète et de se rendre compte du grave problème de surpopulation qui entraîne des famines.
Xavière Gauthier, Naissance d’une liberté. France XXI°


~ Toute âme est un sépulcre où gisent mille choses ;
Des cadavres hideux dans des figures roses
Dorment ensevelis.
On retrouve toujours les larmes sous le rire,
Les morts sous les vivants, et l’homme est, à vrai dire,
Une Nécropolis.
~ Cessez donc, cessez donc, ô vous, les jeunes mères
Berçant vos fils aux bras des riantes chimères,
De leur rêver un sort ;
Filez-leur un suaire avec le lin des langes :
Vos fils, fussent-ils purs et beaux comme les anges,
Sont condamnés à mort !
Théophile Gautier, La mort dans la vie. France XIX°

En caractères noirs une phrase est écrite ;
Quatre mots solennels, quatre mots de latin1,
Où tout homme en passant peut lire son destin :
« Chaque heure fait sa plaie et la dernière achève ! »
Oui, c'est bien vrai, la vie est un combat sans trêve,
Un combat inégal contre un lutteur caché,
Qui d'aucun de nos coups ne peut être touché ;
Et dans nos cœurs criblés, comme dans une cible,
Tremblent les traits lancés par l'archer invisible.
Nous sommes condamnés, nous devons tous périr ;
Naître, c'est seulement commencer à mourir.
Théophile Gautier, L’horloge. France XIX°
1. « Vulnerant omnes, ultima necat. » : « Toutes blessent, la dernière tue. »


On parla de l’architecture moderne, pour déplorer le manque d’imagination des architectes qui ne savent qu’entasser les logements l’un sur l’autre, comme s’il s’agissait de cabanes à lapins. Gérard fit remarquer qu’on était, en effet, à l’âge de la procréation lapine et que tout en redoutant les misères, les famines, les troubles et les guerres qui naissent de la surpopulation, toutes les autorités civiles et religieuses poussent hommes et femmes à fabriquer sans lassitude des portées d’enfants. « Puisqu’on le paie pour cela, conclut-il, quand le citoyen veut augmenter son revenu, il ne retrousse pas ses manches, il se met au lit. »
Pierre Gaxotte, Le nouvel ingénu. France XX°


Et pourquoi les cigognes qui apportent des bébés, avec le paquet d’emmerdes qui s’ensuit, pourquoi elles ne reprendraient pas les vieux qui sont morts, en repartant ? On ne leur a rien demandé, après tout.
Philippe Geluck, Le Chat (in Victoire, supplément au Soir du 28 mai 2010). Belgique XXI°

~ Vous savez comme les enfants qui hurlent ont le don de me mettre hors de moi. Surtout lorsqu’il s’agit des enfants des autres et surtout si leurs cris envahissent ma bulle privée dans un espace public. Au restaurant, au cinéma, dans le train, j’estime que les jeunes parents devraient être poursuivis devant les tribunaux pour avoir laissé ouvertement brailler leur progéniture sans la bâillonner illico. Fumer dérange les voisins de table ? Les cris d’enfants, pareillement. Halte au terrorisme bambinesque ! […] Et je ne critique pas ici les petiots eux-mêmes, mais plutôt leurs infâmes géniteurs.
~ Nous aurons tout juste le temps d’évoquer Père Ascension, Père Fête des Mères, Père Fête des Pères, qui veillent à ce que tous les enfants pensent à remercier à date fixe leur Maman et leur Papa de leur avoir permis de connaître un jour la pollution atmosphérique, l’encéphalite spongiforme bovine et le poulet à la dioxine.
~ Con de poisson […] Nous allons droit dans le mur et nous sommes incapables de freiner, de nous arrêter ou de faire demi-tour. Avons-nous réellement évolué depuis l’époque où nous vivions sous l’eau ? Nous aurions dû y rester, au fond. Bien au fond. […] Aucun humain ne serait jamais descendu d’aucun singe avec les ravages, le malheur et la souffrance qui en ont résulté. […] Et l’homme serait sans doute devenu moins crétin s’il n’avait eu pour ancêtre ce con de poisson.
Philippe Geluck, Geluck enfonce le clou. Belgique XXI°

Quand je vois dans quelle merde on se trouve aujourd’hui, je me dis qu’il y a 6 millions d’années, les animaux qui ont choisi de ne pas emprunter la voie de l’évolution ont sans doute été plus malins que les hommes.
Philippe Geluck, Le Chat (in Victoire, supplément au Soir du 03 novembre 2012). Belgique XXI°


~ Je multiplierai les peines de tes grossesses, dans la peine tu enfanteras des fils.
~ Maudit soit le sol à cause de toi ! A force de peines tu en tireras subsistance tous les jours de ta vie.
~ Les desseins du cœur de l’homme sont mauvais dès son enfance.
Genèse. Israël IX° AC


Si ce n’avait été à cause de l’inclination au mal, aucun homme n’aurait construit une maison, épousé une femme ou procréé des enfants.
Genèse Rabba. Israël V°


~ Tout le corps humain est sale et sent mauvais, et, fondamentalement, il est pourri. Qui pourrait tenir à ce corps si sale, et qui pourrait s’en vanter ?
~ Depuis sa naissance, l’homme souffre sans cesse.
~ Tel est le monde de l’homme. Il faut renoncer avec dégoût à ce monde misérable.
Urabe Genshin, Ojôyôshû. Japon X°


~ Que reste-t-il, sinon l’espoir de voir finir le monde et ma détresse vaste comme le monde ?
~ La fin du monde est proche ? Ceci me rassure. C’est aussi la fin des difficultés.
Michel de Ghelderode, La balade du Grand Macabre. Belgique XX°

~ N’être plus rien, telle était ma jouissance en cette minute que je ne mesurais pas, les siècles n’étant plus calculables.
~ Les oiseaux geignaient, lamentables, à l’imitation de nouveau-nés, malades, qui se plaignent interminablement, et qu’on ne sait ni consoler ni endormir : qui se plaignent de quoi, sinon d’être nés.
Michel de Ghelderode, Sortilèges. Belgique XX°


Voix de genèse, Amour et Trépas, ô pleurs longs !
Un soir l’Orgue montait dans l’horreur des Violons…
Horreur ! la Terre pleure, et, grande Trisaïeule,
Par la vulve et l’ovaire aux ouvraisons de gueule
Ainsi qu’Une en gésine appelle et meugle seule :
Horreur ! la Terre pleure et pousse, en sa Terreur,
Son sein de glaise rouge et l’immense dièse
De la genèse en pleurs qui la saigne et la lèse :
Horreur ! la Mère pleure et du Tout la genèse
Dans le noir a vagi le grand et premier pleur :
Horreur ! la Terre a mis au monde […]
A Toi, Nihil ! ô vainqueur des durées,
A Toi gloire ! ô Tueur sans aise et sans remords !
René Ghil, Dies irae. France XIX°


~ Le diable et le Bon Dieu ne font qu’un ; ils s’entendent. Nous nous efforçons de croire que tout ce qu’il y a de mauvais sur la terre vient du diable ; mais c’est parce qu’autrement nous ne trouverions pas en nous la force de pardonner à Dieu. Il s’amuse avec nous, comme un chat avec la souris qu’il tourmente… Et il nous demande encore après cela de lui être reconnaissants. Reconnaissants de quoi ? de quoi ?…
~ La cruauté, voilà le premier des attributs de Dieu.
André Gide, Les faux-monnayeurs. France XX°

Pour une femme qui souhaite la liberté, te rends-tu compte de ce que c’est que d’avoir la charge d’un enfant ? Quelle dépendance ! Quel esclavage !
André Gide, Geneviève. France XX°


Malheur à ceux dont je suis né !
Père aveugle et barbare ! impitoyable mère !
Pauvres, vous fallait-il mettre au jour un enfant
Qui n’héritât de vous qu’une affreuse indigence ?
Nicolas Gilbert, Les plaintes du malheureux. France XVIII°


Fœtus hideux voué pour une vie encore
Au désespoir des générations
Roulé par la roue de l’horreur de vivre
Du vieux fœtus aïeul
A notre mère putride
La pourriture aïeule
En robe de phosphore
La reine démente
Qui fait et défait
Les destins et les formes
Roger Gilbert-Lecomte, Sacre et massacre de l’amour. France XX°


Tu cédas aux baisers […]
Et te voilà rampant dans la fange natale,
Banal outil de chair perpétuant la chair,
Simple anneau désormais de la Bête vitale
Qui tord dans l’infini son long ventre de ver.
Iwan Gilkin, La douleur du mage. Belgique XIX°

~ L’univers n’est-il pas un immense martyr,
Que sans trêve secoue et torture la vie ?
Naître, mourir, renaître, éternelle agonie !
Lutter, aimer, penser, tout cela c’est souffrir.
~ Terre, où le plaisir ment, où les douleurs sont vraies,
Tu n’es qu’un hôpital de cancers et de plaies
Où sans cesse les morts font place aux moribonds !
Iwan Gilkin, Vocation. Belgique XIX°


~ La mort sur tous les fronts. « La Planète est Foutue ! » Une nouvelle lune se penche pour contempler notre douce planète malade. […] Pas de bébés pour moi.
~ La solitude fait gémir les vieillards […] La ferme, ô femmes qui vous époumonez à réclamer davantage de chair enfantine.
~ Yeux qui pleurent sur terre. Des millions de corps dans la douleur ! Qui pourrait vivre avec cette Conscience et ne pas s’éveiller terrifié à l’aurore ?
~ Beaucoup de garçons et de filles en prison pour leurs corps poèmes et pensées amères […] voix ténue recommanda « Cessez de désirer des enfants »
~ Combien d’âmes parcourent la Maya dans la douleur, combien de bébés sous la pluie illusoire ? […] Des millions de bébés dans la douleur.
Allen Ginsberg, La chute de l’Amérique. Etats-Unis XX°

[Les punks] disent qu’il n’y a pas de futur, ce qui est évident. Je suis entièrement d’accord là-dessus. Je crois que c’est particulièrement lucide de le dire. […] C’est la première fois, sans doute, que de très jeunes gens réalisent ce que Burroughs a dit l’autre soir à la Nova Convention, c’est-à-dire qu’il est devenu très difficile de vivre sur cette planète, surtout à cause de la surpopulation.
Allen Ginsberg, Du bouddhisme aux punks – Entretien avec Allen Ginsberg (1978). Etats-Unis XX°


~ Répondez sans dérobade : s’il existait une solution capable d’abolir la totalité des maux dont gémit notre désastreuse humanité, s’il était possible, par le biais d’un remède simple, immensément peu dispendieux, immédiatement accessible, scrupuleusement inoffensif, d’une efficacité absolue et définitive, de mettre un terme à toute détresse, à toute larme, à tout cri de douleur, à toute pathologie, à toute protestation de mal-être, à tout désespoir, à tout cataclysme, à toute angoisse, à tout malheur, bref à toute torture affligeant l’espèce humaine, auriez-vous la macabre inintelligence de dédaigner un tel remède, de mépriser une telle miraculeuse panacée ? Non, cela va sans dire. Hé bien cette solution existe, et l’arcane s’en livre ici : elle consiste tout bonnement, en sa sainte, ovoïde et colombienne simplicité, à cesser de procréer…
~ L’enfant, c’est un cadeau que les parents se font à eux-mêmes.
~ A pouvoir lire en pleine conscience le règlement du pénitencier qui métaphorise toute destinée terrestre, qui vraiment voudrait y faire, de plein gré, son entrée ? Sûrement pas un marmot pensant et clairement informé de ce qui l’attend !
~ Est-ce aimer sincèrement son enfant que de le propulser dans un monde où le malheur abonde tandis que le bonheur présente une fâcheuse propension à se faire attendre, sinon à se dérober ? […] Si l’on aime authentiquement son enfant, il n’est pas d’autre option, au vu des souffrances dont la vie regorge, que de s’abstenir de l’enfanter !
~ Ne pas naître, c’est échapper à tous les préjudices, y compris celui de ne pas naître, si naître pouvait être autre chose qu’un préjudice.
~ Parmi ces prétextes souvent invoqués pour justifier qu’un misérable bébé vienne s’exposer à nos désarrois figure en bonne place l’idée de « perpétuer l’espèce ». Pour contrer cet argument d’un aussi bel idéalisme, on pourra faire remarquer que l’espèce humaine n’existait pas voici un milliard d’années et que personne ne s’en plaignait… Imaginons à présent que notre espèce disparaisse bel et bien, qui donc demeurera-t-il pour s’en plaindre ? Le dernier des hommes ? Non, non, celui-là aussi aura disparu ; alors quelle voix humaine gémira-t-elle sur l’évaporation du plus féroce de tous les prédateurs ?
~ Faire souffrir autrui est incompatible avec l’Ethique. Or vivre signifie souffrir. Donc donner la vie est incompatible avec l’Ethique.
~ Sur une planète dont la santé périclite à cause de la quantité irraisonnée de ses habitants, un écologiste qui se reproduit est un écologiste douteux…
~ Aucune profession ne nécessite plus de compétences que le métier de parents et c’est pour celle-là qu’on en réclame le moins !
~ Il s’agira bien un jour d’accorder à tout incréé le droit de ne pas naître, ou, à défaut, de permettre à quiconque se constate lésé par l’existence d’assigner en justice ceux qui la lui ont infligée.
Théophile de Giraud, L’art de guillotiner les procréateurs : manifeste anti-nataliste. Belgique XXI°

~ Grève de la procréation. Il est regrettable que les altermondialistes n’aient pas l’idée, ou l’intrépidité, d’utiliser l’unique arme réellement crapuloclaste dont ils disposent : la Grève de la Procréation. Priver, aussi longtemps que nécessaire, les multinationales de nouveaux travailleurs à broyer et de nouveaux clients à gruger, voilà qui ferait certainement (ré)fléchir les plénipotents gredins de la finance et de l’industrie planéticide. Plus un seul bébé tant que les richesses ne sont pas équitablement réparties, plus un seul bébé tant que les droits de l’homme, de la femme et de l’enfant ne sont pas intégralement respectés, plus un seul bébé tant que l’environnement ne fait pas l’objet d’une protection étanche et d’une dépollution poussée, bref, un moratoire absolu sur la fabrication de bébés tant que notre monde demeure scandaleusement immonde : quelle claque ! Mais nos révolutionnaires sont-ils capables d’une telle ascèse, d’une telle éthique ? N’ayant guère de scrupules à se reproduire dans une prison-poubelle, ils se plaignent lorsque les puissants les traitent comme des déchets : mais au fond, de toutes ces épluchures, que pense leur progéniture ?
~ Hasard. Monstre de l’humour douteux qui fait que vous devez nommer « papa » ou « maman » telle ou telle personne que vous détestez plutôt que telle autre qui vous semble nettement plus sympathique
~ Parents. A la manière dont certains n’ont pas d’enfants, il serait formidable de n’avoir ni père ni mère biologiques. Cela ne concerne hélas que l’euphorique infinité des néanticoles qui s’acharnent intelligemment à ne pas naître.
~ Reproduire. Les Lumières ont tué Dieu, les surréalistes ont tué la famille, les écrivains d’aujourd’hui tuent le couple, les écrivains de demain tueront l’envie de se reproduire. Voilà ce que j’appelle des lendemains qui fanfarent !
Théophile de Giraud, Aphorismaire à l’usage des futurs familicides. Belgique XXI°


Rilke hait sa mère, il la hait passionnément, pourrait-on dire ; davantage encore que Baudelaire n’a haï la sienne. Elle est quelconque, cette mère, elle n’a rien fait de vraiment épouvantable, elle l’a habillé en fille parce qu’elle avait perdu une fillette et ne s’en consolait pas ; elle a laissé son père le placer dans une école militaire, elle est partie avec un amant ; mais personne, après tout, n’a besoin d’autant de prétextes pour haïr sa mère…
Françoise Giroud, Lou. Histoire d’une femme libre. France XXI°


~ Le gnostique intransigeant manifeste une répugnance invincible à l’égard des diverses manifestations de la sexualité ordinaire (désir sexuel, union, conception, naissance) et même des principaux événements de la vie corporelle (naissance, maladies, vieillesse, mort…). Une telle répugnance à l’égard du corps aboutit peu à peu à considérer ce dernier comme une chose étrangère, qu’il faut subir : le corps est comparé à un « cadavre », à un « tombeau », à une « prison », à un « compagnon indésirable ». […] Le corps, instrument d’humiliation et de souffrance, tire l’esprit vers le bas. […] Le pur gnostique en arrivera à exécrer l’enfantement, responsable de l’« incarcération » des malheureuses âmes.
~ Le pessimisme gnostique pourra s’étendre à toute la création sensible : celle-ci sera alors une œuvre manquée, voire funeste ou criminelle. […] Le gnostique ressent douloureusement le fait d’être jeté dans un monde mauvais, « étrange », absurde – dans un monde pour lequel son être véritable n’éprouve aucune affinité. Le monde est le lieu de la mort, de la souffrance, de la laideur, du mal : c’est un « cloaque », un « désert », une « nuit ».
~ Loin d’accepter le destin, les gnostiques se révoltent contre lui, aspirent à s’en libérer. « Le monde, s’écrie Héracléon, est un repaire de bêtes sauvages ». « L’angoisse et la misère, nous dit Basilide, accompagnent l’existence comme la rouille couvre le fer ». Le mal, c’est le fait même d’exister dans le monde sensible. L’univers tout entier est mauvais. […] A la limite, le monde où nous vivons sera identifié à l’Enfer. Le cosmos visible est le domaine de la succession – sempiternellement absurde – des naissances et des morts. […] Les sources subjectives d’une telle expérience sont aisément compréhensibles : celle-ci procède d’une angoisse insupportable devant le mal et la souffrance omniprésents dans le monde sensible.
 [Gnostiques]. Extraits de : Serge Hutin, Les gnostiques.

La règle générale de tous les gnostiques était le refus de la procréation ; ceux qui prônaient la continence, l’abolition du mariage, le faisaient dans cette intention ; ceux qui s’adonnaient aux rapports sexuels les rendaient inféconds au moyen de la contraception et de l’avortement. Ils croyaient que le Démiurge avait dit : « Croissez et multipliez » afin de perpétuer le malheur de l’humanité sur terre, et qu’il fallait rompre la chaîne de l’évolution, ramener définitivement les âmes vers le huitième ciel, en s’abstenant de faire des enfants.
[Gnostiques]. Extraits de : Alexandrian, Histoire de la philosophie occulte.

~ La caractéristique du gnosticisme […] est de concevoir ce Démiurge comme mauvais et de l’identifier au Dieu de l’Ancien Testament.
~ Une Puissance mauvaise a créé le monde sensible. Les âmes des gnostiques s’y trouvent prisonnières malgré elles.
~ Plotin, Clément, Origène reprochent aux gnostiques de décliner toute responsabilité dans le mal et de rendre le Créateur responsable de celui-ci. Pour les gnostiques, le monde sensible est créé – ou, au moins, entièrement et absolument dominé – par une Puissance mauvaise, ou inconsciente, ou bornée, ou passionnée, ou désordonnée. C’est elle qui est responsable du mal physique et du mal moral que l’on constate dans le monde sensible.
[Gnostiques]. Extraits de : Pierre Hadot, article « Gnostiques », Encyclopaedia Universalis, 1985

~ Les gnostiques [voyaient] dans toute la création matérielle le produit d’un dieu ennemi de l’homme. Viscéralement, impérieusement, irrémissiblement, le gnostique ressent la vie, la pensée, le devenir humain et planétaire comme une œuvre manquée, limitée, viciée dans ses structures les plus intimes.
~ Il est possible – et la plupart des gnostiques l’ont fait – de refuser le jeu truqué du monde en s’abstenant de procréer, d’ajouter entre le néant et la mort l’absurde parenthèse de la vie.
[Gnostiques]. Extraits de : Jacques Lacarrière, Les Gnostiques.


~ N’omettons point, crénom ! de jeter bas les grilles
Qui depuis deux mille ans constituent la famille.
~ Proclamons qu’à tout coup la femme devient moche
Quand elle est transformée en pondeuse de mioches !
Noël Godin alias Georges le Gloupier alias L’Entarteur, Ode à l’attentat pâtissier. Belgique XX°

~ Pondre des lardons dans le monde d’aujourd’hui, dans ce monde criminel de bêtise, n’est-ce pas vraiment vraiment très crétin ?
~ Pondre des lardons, c’est tout à fait dégueu et foutrement égocentrique dans un monde aussi désespérant que le nôtre !
~ Pondre des lardons c’est une des ruses principales du système pour nous tenir sous sa coupe. La maternité, c’est la servitude volontaire par excellence, grâce à laquelle les despotismes continuent à prospérer !
~ Au même titre que les flics, les curés et les patrons, les parents sont les loufiats du capital, du travail et du pognon !
Noël Godin alias Georges le Gloupier alias L’Entarteur, Les marmots aux chiottes ! (texte lu à la « Fête des Non-Parents » à Paris le 15 mai 2010 et publié dans le journal satirique El Batia Moûrt Soû, décembre 2010, n°64). Belgique XXI°


~ Il est un instant qui comble toute chose,
Tous nos désirs, nos rêves, nos espoirs,
Et qu’on redoute, Pandore,
C’est la Mort !
~ O père, fais que nous mourions !
J. W. von Goethe, Prométhée. Allemagne XVIII°

Je rends grâces aux Dieux
D’avoir ainsi voulu m’effacer de ce monde,
Sans que je laisse après moi des enfants.
Et toi, je te conseille
De ne pas trop aimer le soleil, ni les astres :
Viens ! Suis-moi dans le sombre royaume ! […]
Sans enfants et sans crime encore, viens !
J. W. von Goethe, Iphigénie en Tauride. Allemagne XVIII°

~ Tout ce qui existe est digne d’être détruit, il serait donc mieux que rien n’existât.
~ Qu’est-ce que le monde peut m’offrir de bon ? Tout doit te manquer, tu dois manquer de tout ! Voilà l’éternel refrain qui tinte aux oreilles de chacun de nous, et ce que, toute notre vie, chaque heure nous répète d’une voix cassée. […] Voilà pourquoi la vie m’est un fardeau, pourquoi je désire la mort et j’abhorre l’existence. […] Oh ! que ne suis-je jamais né !
J. W. von Goethe, Faust. Allemagne XIX°

Des rudes chemins de la terre,
Heureux enfants, vous n’avez aucune connaissance.
J. W. von Goethe, Faust II. Allemagne XIX°
Note : il s’agit d’enfants mort-nés.


ô, qu’il vaudrait mieux pour ces gens-là n’être jamais nés !
Nicolas Gogol, Viatique in Passages choisis de ma correspondance avec mes amis. Russie XIX°


Mes compagnons d’infortune, plus je réfléchis sur la répartition du bien et du mal ici-bas, plus je m’aperçois que, si la somme de plaisir dévolue à l’homme est grande, celle de la souffrance l’est plus encore. Cherchons dans le monde entier : pas un homme si heureux qu’il ne lui reste rien à désirer ; et, chaque jour, des milliers d’hommes nous prouvent, par le suicide, qu’il n’y avait plus pour eux d’espérance. Il est donc évident que, si, dans cette vie, il ne peut y avoir pour nous de bonheur complet, nous pouvons être complètement malheureux.
Oliver Goldsmith, Le pasteur de Wakefield. Irlande XVIII°


L’homme pisse l’enfant et la femme le chie.
Jules et Edmond de Goncourt, Journal (1861). France XIX°


C’est notre croissance démographique qui est à la base de presque tous les problèmes que nous avons infligés à la planète. […] Si nous étions peu, les mauvaises choses que nous faisons n’importeraient pas vraiment et Mère Nature s’en occuperait – mais nous sommes tellement nombreux […] Nous devrions discuter du fait d’endiguer d’une manière ou d’une autre la croissance de la population humaine. […] C’est très frustrant que les gens ne veuillent pas aborder ce sujet.
Jane Goodall, interview par Nick Morrison (AFP, 24 mars 2010). Grande-Bretagne XXI°


~ Les pauvres sont toujours riches en enfants, et dans la saleté et les fossés de cette rue se trouvent des groupes d’entre eux, du matin au soir, affamés, nus et sales.
~ Chez beaucoup de gens, le souvenir du passé tue toute énergie pour le présent et étouffe tout espoir pour l’avenir.
Maxim Gorki, Créatures qui furent autrefois des hommes. Russie XIX°

Tu retourneras au village, et tu te marieras et commenceras à creuser la terre et à semer du blé, ta femme te donnera des enfants, la nourriture ne sera pas trop abondante, et donc tu bûcheras toute ta vie. Eh bien ? Y a-t-il tant de douceur dans tout cela ?
Maxim Gorki, Tchelkach. Russie XIX°

Le nombre de personnes qui, au cours de cette amère année, manquaient de pain était épouvantable. Les paysans affamés erraient à travers le pays en groupes, de trois à vingt ou plus ensemble. Certains portaient des bébés dans leurs bras ; d’autres traînaient de jeunes enfants par la main. Les enfants avaient l’air presque transparents, avec une peau bleuâtre, sous laquelle coulait, au lieu de sang pur, une sorte de liquide épais et malsain. La façon dont leurs petits os pointus faisaient saillie sous la chair émaciée parlait avec plus d’éloquence que ne le pourraient des mots. Leur vue faisait mal au cœur, tandis qu’une douleur constante et intolérable semblait ronger l’âme même. Ces enfants affamés, nus et exténués ne pleuraient même pas. Mais ils regardaient autour d’eux avec des yeux perçants qui étincelaient avidement chaque fois qu’ils voyaient un jardin, ou un champ, dont le blé n’avait pas encore été emporté. Ensuite, ils lançaient un regard triste vers leurs aïeux, comme pour demander : « Pourquoi m’a-t-on fait naître dans ce monde ? »
Maxim Gorki, Mon compagnon de voyage. Russie XIX°


O Dieu, qui que tu sois, Destin, Mère-Nature,
Pourquoi m’avoir tiré de l’ombre du Néant ?
Réponds ! que t’avait fait ton humble créature
Pour l’écraser sous ton dur talon de géant ?
Qui pouvait te forcer, Eternel impassible,
A me clouer au mur humain, comme une cible
Destinée aux flèches du Mal ?
N’es-tu point assez riche en fait de dents qui grincent ?
Et fallait-il encore que mes mâchoires vinssent
Grincer au concert infernal ?
Emile Goudeau, Le gibet de misère. France XIX°

~ Il y eut un drame : la mère s’étant jetée à la Seine avec sa plus petite fille.
~ « Si l’on exige de nous que, dans la douleur atroce de l’enfantement, nous mettions au monde des enfants que la guerre doit faucher, et des filles qui, épouses ou mères, verront écraser par la guerre tout ce qu’elles aiment le plus au monde, il ne reste aux femmes qu’un parti à prendre : proclamer la grève des ventres ! » Et les femmes applaudissaient. Oui, l’Amour, oui, la Volupté, oui, le Baiser, mais plus d’enfants.
Emile Goudeau, La graine humaine. France XIX°


~ Un cas typique de maladie sexuellement transmissible, c’est la famille.
~ On ferait moins de gosses, il y aurait moins de pédophiles.
Jean-Marie Gourio, Brèves de comptoir. L’anniversaire !. France XX°


~ Les larves du sphex, autre guêpe, sont nourries de grillons vivants réduits par une piqûre à l’immobilité. Sitôt éclose, la larve attaque le grillon sur le ventre duquel, à une place choisie, l’œuf a été pondu. Le pauvre insecte paralysé proteste par de faibles remuements d’antennes, de mandibules, en vain : il est dévoré vivant, fibre à fibre, par un gros ver qui lui ronge les entrailles, avec assez d’habileté pour ne toucher d’abord qu’aux parties non essentielles à la vie et conserver sa proie jusqu’à la fin fraîche et savoureuse. Telle est la mansuétude de la nature, cette bonne mère.
~ Tout n’est, dans la nature, que vol et assassinat. 
~ Toute vie n’est pas autre chose qu’une somme suffisante de meurtres.
Remy de Gourmont, Physique de l’amour. France XX°


Dis-moi : qu’est-ce qui a changé sur cette Terre que, d’après la légende, j’ai créée en une semaine ? A quoi bon prolonger inutilement cette farce ? Pourquoi les gens continuent-ils obstinément à se reproduire ?
Juan Goytisolo, Et quand le rideau tombe. Espagne XXI°


La plus grande iniquité est d’amener des enfants à la vie, parce que leur donner naissance est les condamner à mort. Nous les tirons du néant, de l’état de complète inconscience, pour les plonger dans la réalité – et ensuite nous les obligeons à subir l’agonie de la mort, dont ils ne devraient pas faire l’expérience s’ils n’avaient pas d’abord reçu la vie.
Zbigniew Grabowski, Rozmowy z Toba. Pologne XX°


~ La nature a procédé avec adresse, sinon avec tromperie, à l’égard de l’homme au moment où il vient au monde, en disposant qu’il y entrerait sans aucune espèce de connaissance, afin qu’il n’éprouvât point d’hésitations.
~ Je suis convaincu que, sans ce piège universel, nul ne voudrait entrer dans un monde si trompeur, et qu’une fois entrés, bien peu accepteraient de continuer à vivre, s’ils savaient d’avance ce qu’est la vie. Car qui voudrait, en connaissance de cause, mettre le pied dans un royaume si mensonger, une prison en réalité, pour y subir des peines aussi nombreuses que variées ?
~ Un commun présage des misères qui l’attendent, c’est que l’homme pleure en naissant.
~ Que peut être une vie qui commence entre les cris de la mère qui la donne, et les pleurs de l’enfant qui la reçoit ?
Baltasar Gracian, L’homme détrompé. Espagne XVII°


~ Aujourd’hui, les espèces disparaissent à un taux qui est appelé à surpasser celui de la dernière grande extinction. La cause n’en est pas une quelconque catastrophe cosmique. Comme le dit Lovelock, c’est une peste d’êtres humains.
~ La destruction du monde naturel […] est une conséquence du succès évolutif d’un primate exceptionnellement rapace. […] Homo rapiens est devenu trop nombreux.
~ Une population humaine approchant les 8 milliards ne peut être maintenue qu’en ravageant la Terre.
~ La croissance de la population humaine qui a eu lieu au cours des quelques dernières centaines d’années ne ressemble à rien tant qu’aux pics qui se produisent dans les effectifs de lapins, de souris et de rats de peste. Comme eux, elle ne peut être que de courte durée.
~ Les humains sont comme tout autre animal nuisible. Ils ne peuvent pas détruire la Terre, mais ils peuvent facilement saccager l’environnement qui les sustente.
~ Communément pratiquée, la philosophie est la tentative de trouver de bonnes raisons à des croyances conventionnelles. […] Si Schopenhauer est à peine lu aujourd’hui, c’est parce que peu de grands penseurs modernes sont allés autant à l’encontre de l’esprit de leur temps et du nôtre.
~ Le génocide est aussi humain que l’art ou la prière. Et ce non pas parce que les humains sont une espèce inhabituellement agressive. Le taux de morts violentes chez certains singes dépasse celui des humains – si les guerres sont exclues du calcul ; mais comme le fait oberver E.O. Wilson, « si les babouins hamadryas avaient des armes nucléaires, ils détruiraient le monde en une semaine ». Le meurtre de masse est un effet secondaire du progrès technologique. Depuis la hache de pierre jusqu’à nos jours, les humains ont utilisé leurs outils pour se massacrer les uns les autres. Les êtres humains sont des animaux fabricants d’armes dotés d’une insatiable prédilection pour le meurtre.
~ Homo rapiens est seulement une espèce parmi beaucoup d’autres, et il n’est pas évident qu’elle mérite d’être préservée. Tôt ou tard, elle connaîtra l’extinction.
~ Aussi longtemps qu’augmentera la population, le progrès consistera à travailler dur pour suivre la cadence. L’humanité ne peut limiter ce dur travail que d’une seule manière, qui est de limiter ses effectifs. Mais limiter les effectifs humains se heurte à de puissants besoins humains. Les Kurdes et les Palestiniens voient un grand nombre d’enfants comme une stratégie de survie. Lorsque des communautés sont enfermées dans des conflits insolubles, un taux de natalité élevé est une arme.
John Gray, Straw dogs. Angleterre XXI°


Ci-gît, libéré de la douleur, protégé contre la misère,
Un enfant, le trésor des yeux de ses parents […]
Peu nombreux furent les jours alloués à son souffle ;
A présent laissons-le dormir en paix sa nuit de mort.
Thomas Gray, Epitaphe pour un enfant. Angleterre XVIII°


La mort était la seule valeur absolue de mon univers. Quand on a perdu la vie, on ne peut plus rien perdre à jamais. […] La mort est beaucoup plus indéniable que Dieu, et avec la mort disparaît la possibilité quotidienne de voir mourir l’amour. Le cauchemar d’un avenir d’ennui et d’indifférence se dissipe. Je n’aurais jamais pu être pacifiste. Assurément, tuer un homme, c’est lui octroyer un inappréciable bienfait.
Graham Greene, Un Américain bien tranquille. Angleterre XX°


Ah ! puissé-je n’avoir jamais pris forme ni consistance dans les entrailles d’une mère, ne m’être jamais orienté vers la lumière de l’existence, n’avoir jamais été inscrit sur le registre des naissances, jamais inclus dans le nombre des hommes.
Saint Grégoire de Narek, Prière. Arménie X°


Car la procréation physique d’enfants (que cet argument ne mécontente personne) est plus pour l’homme un embarquement à bord de la mort qu’à bord de la vie. La corruption a son commencement dans la naissance et ceux qui s’abstiennent de la procréation par la virginité provoquent eux-mêmes une suppression de la mort, en l’empêchant de progresser davantage à cause d’eux, et, en se dressant eux-mêmes comme une sorte de borne frontière entre la vie et la mort, ils évitent que la mort ne s’étende.
Saint Grégoire de Nysse, Traité sur la virginité. Anatolie IV°


Que la condition de la vie est muable !
Et si nous fault souvent en un fascheux sejour,
Faschez de vivre tant, attendre nostre jour :
Qu’une subite mort est douce au miserable !
Mais d’autant elle fuit quell’ se sent desirable.
Jacques Grévin, La Gélodacrye (Livre I, Sonnet XVI). France XVI°

Le povre poete
N’a rien parfaict qu’une peine parfaicte. […]
Il n’y a rien icy qui ne soit malheureux. […]
Pauvre homme, tu feus faict d’un petit de mortier, […]
Tu te laisses mourir plus souvent en naissant,
Ou si tu es plus long temps jouissant
Vingt ans ou quarante ans de ceste povre vie,
Ce ne sera sans une maladie,
Qui tousjours compaignant le sentier de tes pas
En la parfin te conduit au trespas.
Jacques Grévin, Elégie sur la misère des hommes. France XVI°


Adieu, monde, car on ne peut te faire confiance, ni rien attendre de toi. […] Tu dupes, fais choir, insultes, souilles, menaces et oublies chacun, et chacun pleure, souffre, se lamente, se désole, périt ; et chacun fait une fin. […] Adieu, monde, car je suis las de tout commerce avec toi. La vie que tu nous donnes est un misérable pèlerinage ; inconstante, incertaine, rude, dure, fugitive et impure, elle est vouée à la pauvreté et à l’erreur. C’est plutôt une mort qu’une vie.
Hans Jakob Christoffel von Grimmelshausen, Les aventures de Simplicius Simplicissimus. Allemagne XVII°


Qu’est donc notre vie sur terre ?
Se trouver là mis au monde ;
Sans voix, inerte au berceau,
Rester couché sans rien faire ;
Ramper, courir, debout, assis,
J’ai faim, j’ai soif, j’ai froid, j’ai chaud ;
Travailler, peiner pour rien ;
S’affliger de nombreux maux ;
Voir toujours planer la mort,
Pour finir rendre l’esprit ;
De nouveau poussière et cendre,
Telle est notre vie sur terre.
Johann Grob, La ronde de la vie. Suisse XVII°


Quant à moi, je le dis, depuis que du zénith
Les rayons de Phébus éclairent ma pâleur,
Jamais je ne connus un seul jour sans angoisses.
Bienheureux celui-là, monde, ô vallon de larmes,
Qui sans avoir posé le pied sur cette terre,
Part du sein maternel vers les célestes joies !
Andreas Gryphius, Volupté du monde. Allemagne XVII°


[Certaines tribus Guarani] attendaient et désiraient la Fin définitive du Monde. Nimuendaju écrivait en 1912 : Non seulement le Guarani, mais toute la nature est vieille et fatiguée de vivre. Plus d’une fois les hommes-médecine, lorsqu’ils rencontraient en rêve Nanderuvuvu, ont entendu la Terre l’implorer : « J’ai dévoré trop de cadavres, je suis repue et épuisée. Père, fais que cela finisse ! ». […] On trouverait difficilement une expression plus émouvante de la fatigue cosmique, du désir du repos absolu et de la mort.
[Guarani] (célèbre tribu d’Amazonie). Extraits de : Mircea Eliade, Aspects du mythe.


~ Révolutionnaire ou marginal, on t’accuse de fouler aux pieds les traditions. Il en est au moins une que tu perpétues vigoureusement : la procréation.
~ L’enfant te sert de panacée. Il cimente ton couple qui s’effondre. Il remplit le vide de ton existence. Il est le remède à ta solitude. Il est le futur où tu projettes tes projets avortés, tes espoirs déçus. Il est ta propriété exclusive. Tu en obtiens facilement admiration et reconnaissance.
~ Il est temps d’assumer ta sexualité sans sublimer tes désirs atrophiés dans la ponte de petits pantins chauds et braillards. Tu n’es pas chargée de l’avenir de l’espèce.
~ Si ta soif de donner l’amour est véritable, prends avec toi les enfants que les autres ont faits par hasard.
~ Tu confonds la procréation et la course aux armements ; tu veux continuer à faire des petits révolutionnaires (!) parce que les autres font des petits conformistes. Tu dis (Margaret Mead) que c’est une grande aventure du temps présent de faire des enfants pour un monde inconnu. Mais tu fais courir l’aventure aux autres.
Claude Guillon, Ecoute petit homme. France XX°


Dieu a organisé quelque chose qui n’existait pas, mettons le chaos. Mais qu’était ce désordre que Dieu allait informer ? Il a pris du chaos pour faire une montagne, un lac, un désert, et le pire de ses méfaits, des messieurs : il n’y a pas lieu de pavoiser, pour un ratage c’en est un de taille.
Tom Gutt, préface à : André Stas, Collages. Belgique XXI°


En toi nous sommes, Douleur, en toi nous vivons !
La suprême ambition de tout ce qui existe
Est de se perdre dans le néant, s’anéantir,
Dormir sans rêves…
Manuel Gutierrez Najera, To be (in Poésies). Mexique XIX°


Les souffrances de la naissance, la maladie, la vieillesse et la mort s’abattent sur nous, comme la pluie. Comprendre cela et ne pas lutter pour la libération : qu’y aurait-il de plus fou ?
Gyalwa Gendün Gyatso (deuxième Dalaï-Lama). Tibet XVI°. Cité in : Gilles van Grasdorff, Paroles des Dalaï-Lamas.


§ Il faut informer clairement, sans hypocrisie, sans parti pris. Il faut dire : six milliards d’habitants, c’est trop. Moralement, c’est une grave erreur, à cause de la distorsion aggravée entre pays riches et pays pauvres. Et, pratiquement, c’est dramatique.
§ – A l’origine de tous nos dangers, de toutes ces menaces dont nous parlons, avant l’argent, je mets la surpopulation
– Vous êtes donc pour le contrôle des naissances ?
– Absolument. Il faut le faire connaître et le promouvoir […] aussi vite que possible.
§ Il faut donc éduquer les populations du tiers-monde. Car elles ne savent rien, je le vois ici autour de moi. Et il faut le faire énergiquement, sans réticence sentimentale. C’est une nécessité immédiate, une urgence. Il faut leur dire, avec tout ce que cela suppose de malentendus : vous faites fausse route, votre accroissement démographique beaucoup trop fort vous conduit à une misère plus terrible encore.
Tenzin Gyatso (quatorzième Dalaï-Lama). Tibet XX°. Cité in : Sa Sainteté le Dalaï-Lama et Jean-Claude Carrière, La force du bouddhisme.

Du point de vue bouddhiste, toutes les traditions et leurs enseignements s’accordent sur le même but à atteindre : soulager la misère de la vie humaine et interrompre le cycle des existences. En cela, elles sont toutes dignes d’intérêt, même si leurs méthodes diffèrent.
Tenzin Gyatso (quatorzième Dalaï-Lama). Tibet XX°. Cité in : Gilles van Grasdorff, Paroles des Dalaï-Lamas.


~ Quel déplorable cri vient blesser mon oreille ?
Quelle est donc cette plainte, et qui verse des larmes ?
Quel est ce pauvre ver qui naît à la lumière ?
Il a ouvert les yeux, et c’était pour pleurer,
Il a vécu à peine et déjà doit payer
Tribut à la douleur.
~ Se courber sous le joug et vivre un lourd supplice,
C’est cela qui t’attend ! et qui nous attend tous.
Gustaf Fredrik Gyllenborg, La misère de l’homme. Suède XVIII°


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